Chapitre 1, Le côté ombre

Du 10 octobre au 29 novembre 2020
Avec la participation de Camille Ayme, François Dehoux, Estelle Deschamp, Laurent Le Deunff, Christophe Doucet, François Dufeil, Wandrille Duruflé, Fanny Guérineau, Ibai Hernandorena, Eléonore Pano-Zavaroni, Johan Parent, Jean-Xavier Renaud, Auguste Rodin, Capucine Vever, Rémi Voche.
La Biennale de l’Architecture disparue est à l’initiative de l’association Solarium Tournant, installée dans la ville d’Aix-les-Bains depuis 2016. Elle accueille des artistes en résidence et conçoit des expositions autour des travaux du Dr Jean Saidman.
La biennale est un temps permettant à l’art contemporain de s’installer dans la ville et d’engager un dialogue entre les installations in situ réalisées par les artistes résidents, les œuvres empruntées auprès d’artistes et les différents espaces qui composent la ville (centre historique, lac, bois, etc.).
Pour cette première édition, du 10 octobre au 29 novembre 2020, les artistes invités et les œuvres sélectionnées l’ont été pour aborder la thématique du mouvement.
Le solarium tournant du Dr Jean Saidman, inauguré en 1930 et détruit près de trente cinq ans plus tard était un outil en déplacement constant. Chaque jour, sa plateforme haut perchée tournait à 180° pour suivre la course du soleil. Les patients étaient amenés à se mouvoir jusqu’au centre de soin situé sur la colline surplombant la ville. Le Dr Saidman était lui-même en déplacement par ses allers et venues entre Paris – son Institut d’actinologie –, Aix-les-Bains – son lieu de résidence –, Vallauris et Jamnagar (Inde) – où deux autres solariums tournaient.
Ses recherches enfin l’obligeaient à rester continuellement en mouvement, remettant en cause ses hypothèses, vérifiant ses intuitions, décrivant les résultats de ses innombrables expérimentations.
Pour ce premier chapitre, les quinze artistes invités interagissent à différents moments de leur pratique avec cette notion de mouvement. Par exemple, pour Camille Ayme, le voyage est un élément indissociable de sa pratique voire de ses productions. Chez Laurent Le Deunff, l’œuvre n’est jamais figée, elle se réinvente au moins annuellement. Avec Capucine Vever, le déplacement est un sujet de travail en soi. De même, l’approche de François Dufeil est constitutive de nombreux allers-retours
entre questions esthétiques et réalité fonctionnelle de ses sculptures-outils.
Pour ce premier événement imaginé dans l’espace public, la médiation est une question centrale de l’exposition.
Elle se fera par le biais d’un dispositif mêlant signalétique, textes, etc. Enfin plusieurs événements (performances, rencontres, etc.) ponctueront régulièrement le temps de ce premier chapitre, pour que s’ouvre Le côté ombre.

Chapitre 1 – Le côté ombre
En 1929, quelques semaines avant la fin de la construction de son premier solarium tournant, le Dr Jean Saidman fait réaliser un film – certainement à but promotionnel – relatant la fin des travaux et le temps de l’inauguration.
Le spectateur découvre la carcasse métallique actionnant la rotation, la charpente, l’ascenseur et la vue offerte sur la ville. Puis ce sont les premiers curieux qui défilent à l’image et enfin l’inauguration officielle. Les salles de soin sont évidemment mises en avant, tout comme les outils et les scientifiques. Pourtant, un détail a priori sans importance tient une place particulière. La face qui ne se trouvera jamais exposée au soleil, seulement ouverte de quelques petites fenêtres fixes, est présentée et ainsi nommée « Le côté ombre. »1.
Le carton indiquant le nom de cette face transporte d’un geste simple cet outil rotatif à 180° dans une construction à 360°. Le côté ombre dévoile dès lors l’aspect sculptural – dont on peut faire le tour – de la structure. Il indique et renforce au point de le rendre indissociable de son objet, le caractère mouvant de la construction.
La première Biennale de l’Architecture disparue est sous-titrée Le côté ombre – reprenant les termes du Dr Saidman – car elle ambitionne de tisser un réseau de relations entre la démarche du docteur en actinologie et les pratiques artistiques contemporaines. Notamment, pourquoi l’art est, quoi qu’il en soit, en relation continuelle avec la notion de mouvement ? Il peut être question d’une action mécanique, d’une vivacité cinétique, d’une transmission idéologique, d’un élan théorique, d’une course physique, d’une pétulance spirituelle, d’une évolution temporelle, etc.
Dans la pratique des quinze artistes exposés, cette notion peut être constitutive, formelle, anecdotique voire apparente dans un second temps. Chez Capucine Vever, Auguste Rodin et Johan Parent, elle est à l’origine même des sujets représentés. Dans les œuvres de Camille Ayme, Christophe Doucet, Wandrille Duruflé ou Ibai Hernandorena, c’est le geste de l’artiste (qui se déplace, sculpte, peint) qui apparaît dans son propre mouvement. Avec l’installation d’Éléonore Pano-Zavaroni ou la performance de Fanny Guérineau, la pratique crée des temps et des espaces de rencontre. Pour Rémi Voche, Estelle Deschamp, Jean-Xavier Renaud ou François Dehoux, l’oeuvre est un condensé ou une partie du mouvement perpétuel de l’histoire humaine qu’elle soit architecturale, artistique voire même géologique. Chez Laurent Le Deunff ou François Dufeil, c’est la proximité de l’objet avec une hypothétique fonction qui le met dans un état constant de déplacement entre sculpture et outil.
Plus généralement, chez le Dr Jean Saidman, comme chez les artistes plasticiens, le déplacement est constant car l’activité se construit sur une pensée en mouvement dans laquelle, le côté ombre est la structure même de l’oeuvre.
- Pour consulter le photogramme du film, cf. Lefebvre Thierry, Raynal Cécile, Les solariums tournants du Dr Jean Saidman Aix-les-Bains, Jamnagar, Vallauris, Paris, Éditions Glyphe, 2010.
Biennale_de_l_Architecture_disparue_Chap_1_Dossier_de_PresseTélécharger
